“Jamais plus !” ; Le Corbeau, ce miroir noir !
- Elsa Le Forban
- 2 juin
- 2 min de lecture
“Et le corbeau, immuable, est toujours installé, toujours installé sur le buste pâle de Pallas, juste au-dessus de la porte de ma chambre ; et ses yeux ont toute la semblance
des yeux d’un démon qui rêve.”
Le Corbeau - Edgar Allan Poe
Traduction française de Charles Baudelaire

Nul besoin d’une planche de Oui-Ja ni même d’incantations d’ici ou d’ailleurs pour invoquer les Démons qui hantent nos Âmes en peine ; impuissants dans nos hallucinations hypnopompiques, une angoisse paralysante nous envahit lorsque le verre de nos miroirs se teinte d’un noir si dense et opaque qu’il en devient suffocant. Ces miroirs obscurs sont là, tapis dans l’ombre de nos cauchemars. Leurs seuls reflets ? Nos terreurs hitchcockiennes.
Nos chauves-souris, nos vampires, nos loups-garous, nos hybrides, nos oiseaux de « mauvais augure » et toutes les figures chthoniennes ambivalentes qui les accompagnent se transmutent dès lors en assaillantes nocturnes ; des Furies tantôt presque diurnes, déchaînées à l’heure où les ombres de la matière noire se muent en des Déesses infernales qui nous obligent la main, tordant nos corps avec les griffes des leurs, appelant ainsi supplices et peurs à nous convoyer, contraints et forcés, dans une longue descente à travers les neufs cercles de l’Enfer.
Jetez-moi donc dans les Limbes : je m’y instruirai auprès de Ptolémée avant d’y critiquer les sophistes avec Platon ; et j’irai même jusqu’à soigner la dernière de toutes les scélérates aux côtés d’Hippocrate ! Balancez-moi ipso facto dans l’Hadès de Mínôs ; j’y explorerai encore et encore le labyrinthe avant de siéger (bien trop) près de Cléopâtre : parées de cobras, nous y séduirons à nouveau tous les Empereurs avant que la cigüe ou l’aconit d’un uræus partagé ne vienne à bout une nouvelle fois de nos âmes si luxurieuses qu’elles en ont été damnées.
Laissez-moi descendre, cercle après cercle ; saluer Cerbère et voler sur le dos des Furies au-dessus des eaux agitées du Styx se jetant dans les bras des Érynies, avant d’être éternellement dévorée par les Harpies. Sorciers, fauteurs de troubles et alchimistes seront mes compagnons d’Enfer avant ma rencontre avec Lucifer ; que craindre du neuvième cercle et de son Seigneur lorsque son sol gelé nous a déjà recraché ?
Rien, coasserait le Corbeau de Poe ; son cryptique « Jamais plus ! » est enfin décrypté, car l’Enfer n’est pas dans l’au-delà : nous y sommes déjà et, seule la Faucheuse nous en délivrera.
Critique d'Elsa Le Forban - Critique d’Art et Conférencière Nationale
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